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Historique de Lame des Tourments (mon perso Abyssal pour Exalted)
Sesus Laruja était un jeune garçon prometteur. Elève à Illicar Academy, il avait fait la joie de ses professeurs et sa famille avait longtemps attendu le jour béni de son exaltation qui n'aurait su tarder. Ses parents étaient d'une longue lignée très pure de Sang-Dragons. Sesus Ergil et Mnemon Lalia étaient tous deux très proches de la souche principale de leurs branches dirigeantes. Et Sesus Mien, sa soeur ainée s'était exaltée très jeune. A la fois Laruja, et son plus jeune frère Siemek allaient être de grands généraux chacun en était certain dans la famille. Et pourtant... Siemek s'exalta avant Laruja. Et Laruja quitta Illicar en étant toujours humain.
Frustré de ne pouvoir entrer dans une école secondaire digne de son rang, et devant les conseillers de ses parents qui expliquaient que, sans doute, il ne s'exalterait jamais, Laruja est entré dans les ordres. L'Ordre Immaculé, pensait-t'il, lui permettrait d'avoir une vie exemplaire, et de s'exalter dans sa prochaine incarnation, enfin. Ergil, son père, fit bien entendu part à Laruja de ses regrets. Même humain, ce jeune garçon était le meilleur bretteur de sa génération. Il aurait fait un grand sous-officer. Mais Laruja dit à son père que rester sous-officier, alors qu'on a la trempe d'un général, parce qu'on a pas le Sang et le Kharma digne de son rang, n'avait aucun intérêt à ses yeux. Et que pour mieux servir sa Maison, il lui vallait mieux chercher à améliorer ses incarnations futures, par la prière et la contemplation. Lalia, sa mère, ajouta qu'il était toujours bon d'avoir un prêtre dans la famille et qu'elle aimerait toujours son fils, qu'il soit exalté ou non, et qu'il soit prêtre ou guerrier. Et le débat fût clos. Laruja s'en alla pour le Cloitre de la Sagesse, mais dans les rangs des initiés humains et non parmi les élèves exaltés de l'école secondaire impériale du même nom.
Pendant des années, Laruja se demanda ce qu'il avait bien pu commetre comme crime dans ses vies antérieures pour ne pas mériter la bénédiction des dragons. Pendant des années, Laruja fut un élève exemplaire du Cloitre, apprenant la sagesse des moines ainsi que leurs arts martiaux. Le jeûne, la prière et la méditation furent ses seuls compagnons pendant toute son adolescence et alors qu'il était devenu un adulte, il rentra dans sa famille en tant que moine. Un moine respecté et charismatique. Lalia et Ergil l'accueillirent à bras ouvert de même que le Colonel Siemek, son jeune frère et Mien, sa soeur, qui revenait de l'Heptagramme. Laruja fît jeûne et prières pour effacer de son esprit le sentiment de jalousie qui s'insinuait en lui à la vue de son frère et sa soeur. Et puis, finalement, il demanda humblement à ses parents le droit de ne pas servir sa famille, de ne pas devenir comme ils en avaient convenu depuis peu entre eux, un confesseur privilégié des Sénateurs Mnemon et Sesus. Bien entendu ses parents accueillirent la nouvelle avec amertume, et son frère et sa sœur se moquèrent ouvertement de lui. A mains nues, il regarda son frère et laissa éclater sa rage en le défiant en duel. Lalia et Mien se regardèrent et dirent que s'il osait faire cela, il serait mis au banc de la Maison, et que l'Ordre Immaculé lui même le rejetterais et l'enjoignèrent à faire ses excuses. Pour toute réponse, Laruja se jetta sur son frère, qui dégaina son épée. Usant des arts martiaux de l'Ordre, Laruja fît une clef de bras à son frère, le désarmant et récupérant son arme, puis la plaça sous la gorge de ce dernier. "C'est tout ce qu'on vous apprends, à vous, Sang-Dragons ?" se moqua t'il, vengeur. Mais son père dégaina lui aussi son arme et lui ordonna de partir. Laruja se servit de la sienne, fît voler l'épée de son père hors de ses mains, et balafra sa soeur avant qu'elle n'ait eu finit d'incanter son sortilège, puis laissant tomber son épée à ses pieds, il s'enfuit en brisant la fenêtre et en sautant dans le jardin.
Parvenu dans le jardin, Laruja s'étonna de la chaleur et de la colère qui brulait en lui comme un brasier. Les gardes le cherchaient mais ne semblaient pas le voir, et les ombres semblaient danser autour de lui comme les flammes dansaient autour de son père quand il se battait. Il s'apperçut alors de l'air consterné de sa mère juste avant qu'il ne frappe sa soeur, et des mots qu'il avait vu se former sur les lèvres de Mien sans qu'il l'entende réellement. Il aurait pu lire sur ses lèvres un seul mot : "Anathème". Quelle idiotie ! Jamais il n'aurait fait partie de ces démons, lui, si humble, si croyant... "Humble ?" dit une voix dans sa tête. "Humble ? Alors que tu es le bras armé du seul véritable Dieu ?" continuait la voix. Mais Laruja ne l'écoutait pas, il bondit sur le muret avec une agilité et une vitesse qu'il ne se connaissait pas malgré son excellente condition physique, et disparut dans une ruelle au nez et à la barbe des gardes. Il finit par tomber, épuisé, au pied du temple de l'Ordre Immaculé le plus proche. Dans son sommeil, il fit un rêve étrange. Dans ce rêve, les prêtres trouvaient son corps endormi, et ils appelaient la garde de son père. Dans ce rêve, ils décidaient de l'enfermer et de le brûler sur la place publique dès le lendemain. Mais non. Il se reveilla dans une curieuse pièce située dans les sous-sols de la ville. En face de lui, un immonde Sang-Dragon du Bois se tenait, grand, gros et gras, affalé sur un trône de jade blanc qui représentait, blasphème, des roses.
Sesus Nagezer, alias "La Limace" était le roi de la pègre. Il se vanta immédiatement d'avoir trouvé le petit moine devant le temple avant les pères supérieurs et l'avoir emmené. Il expliqua également tout de suite à Laruja que les moines ne lui voulaient pas du bien. Il avait porté la main sur sa famille et ses parents, les Dragons seuls savaient pourquoi, et tout le monde le recherchait ici, à présent. "La Rose Blanche" comme il aimait à s'appeler lui même, ne lui donna qu'une seule solution : le servir. Et en échange, il le protegerait et lui ferait quitter la Cité Impériale sans encombre. Après tout, lui même n'était il pas officiellement mort pour toutes les maisons, sauf la sienne, qui le recherchait activement sans jamais mettre la main dessus. Et il en fût ainsi : durant un temps Nagezer format Laruja, qui prit le nouveau nom d'Enkil, à l'assassinat. Il fît de nombreuses missions pour son compte et était un des meilleur assassin de Nagezer quelques années plus tard, à l'époque où leur alliance fût rompue à jamais. En effet, lors d'une mission périlleuse, Enkil, puisque tel était son nom à présent, fût repéré et du combattre Deux Sang-Dragons de la maison V'neet et un de la maison Ledaal. Seul le Ledaal survécut, tandis que le feu du Soleil s'emparait à nouveau d'Enkil, pour la deuxième fois. Il vit clairement le mot se former sur la bouche du Ledaal. Le même que pour sa soeur. "Anathème". Non, décidémment, sa vie ne pouvait pas être ratée à ce point, il ne pouvait pas être un Anathème, pas lui ! Et il partit, loin, très loin... Sur un bateau en partance pour le Seuil.
Enkil voyagea longtemps. Méditant sur sa condition de jeune Dynaste, puis de prêtre, puis de criminel, et maintenant de démon. Seul souvenir de sa vie passée, un bracelet de jade blanc cerclé de plume-acier représentant des dragons. Jamais il ne serait un Exalté. Et pourtant, il avait en lui le pouvoir de maîtriser cet objet. Il le sentait mais il s'y refusait. Tout comme il se refusait à employer la chaleur celeste qui était en lui lorsqu'il avait à combattre. Il ne puisait que sur ses propres réserves et malgré tout, souvent, il avait l'impression d'être plus rapide, plus puissant que quiconque croisait son chemin. A présent, il comprenait pourquoi il avait été le meilleur assassin de "La Limace". Et chaque nuit, des rêves incensés de vies antérieures issues d'un monde inconnu venaient le hanter. Chaque nuit, il se rêvait, prince de la terre, au milieu d'autres Anathèmes comme lui. Chaque nuit, le démon venait le tenter un peu plus, hurlant ses blasphèmes dans son pauvre crane. Enkil n'en pouvait plus. Malgré lui, il s'était dirigé vers une clairière dans le Seuil, près des 100 royaumes. Une clairière qu'il reconnut, car il y avait un tombeau. Sur le tombeau, il lut ses crimes passés, ceux qui lui avaient sans doute valu que les Dragons lui infligent tout cela aujourd'hui. Il avait été un Anathème de la pire espèce, celle des Damnés, les Exaltés de la Nuit. Ses ancêtres Sang-Dragon l'avaient pourchassés et pourfendus durant le Shogunat. Et malgré ses crimes, lui avaient donné une sépulture digne de ce nom dans l'espoir qu'il retrouve enfin le chemin de la lumière dans ses incarnations suivantes. Il y avait là une centure faite des aîles d’une chauve souris, bardé d'orichalque, le métal interdit, preuve de sa trahison, décorée, c'était un comble, de décorations représentant des hommes et des femmes ailées. La même image que celle qui apparaissait de son aura, trompeuse par son immaculée clarté, mais où dansaient en secret les ombres de la nuit. Son emblème sans doute à l'époque.
Enkil s'effondra, l'artefact de sa vie passée dans les mains, devant cette sépulture de pierre richement décorée de ses "exploits". Il regarda autour de lui et ne vit que la mort, qui avait envahit l'endroit depuis. La mort, la nuit qui tombait et des fantômes qui l'entouraient. Son âme avait donc été si impure que sa seule sépulture avait transformé l'endroit en un royaume des ombres ? Il était tellement mal dans sa peau à ce moment là qu'il l'aurait cru. Il était loin de penser qu'en fait, il était un prince de la terre, certes, mais n'avait rien à voir avec l'arrivée des abysses dans cette région. Celle qui en était à l'origine par contre, avait remarqué le jeune solaire qui trainait en ses terres. Et Il allait mettre fin à ses jours quand celle ci décida de lui apparaitre. Enkil, affalé devant sa tombe, l'artefact tombé à ses genoux, venait de saisir son épée. Une jeune fille, une inconnue, s'adressa à lui. "Qui est tu ?" demanda t'elle. "Je suis Enkil" répondit il "Et je serais bientôt mort." Elle rit. "Tu veux mourir ? Toi, un vaillant serviteur du Soleil Inconquis ?" Il était surpris. "Comment sais tu ?" dit il en pointant son épée vers elle cette fois, méfiant. "Pourquoi te méfier, puisque tu veux mourir ? Quel mal pourrais-je te faire, autre que te donner ce que tu souhaites ?" Il rengaina. S'affaissa à nouveau sur le sol, et laissa choir son arme "Alors dépêches toi." murmura t'il. Mais il ne se passa rien. La jeune fille se contenta de le regarder. Il ne s'apperçu qu'à cet instant que malgré toute sa beauté et sa grace surnaturelle, cette jeune fille était encore une enfant. Il lui aurait donné à peine huit ans, s'il ne s'était agit que de sa stature, son visage, ses vêtements ou ses cheveux. Mais ses yeux d'un vert pénétrant étaient si profonds qu'on eut dit qu'elle avait vécu plus qu'une vie d'homme, ou même d'Exalté.
"Pense tu que la mort te délivrera du démon ?" demanda t'elle. "Oui, je le souhaite." répondit il, haineux. "Et pense tu qu'elle te délivrera de toute cette frustration et cette haine ? Ou pense tu que ton fantôme, innasouvi, hantera ces lieux à jamais, te privant de cette réincarnation à laquelle tu aspire ?" Il ne répondit pas. On aurait dit qu'elle lisait au plus profond de son être. "Vient avec moi, je vais te montrer où je demeure." dit elle, sur un ton qui était presque un ordre. il hésita. Elle sourit, et ça le fit fondre comme neige au soleil. "Oui" murmura t'il avec difficulté. Et ils partirent ensemble sur les routes, non sans qu'elle lui rappelle "n'oublie pas tes souvenirs..." avec un petit rire enfantin, la première réaction qu'elle avait eu depuis le début de leur conversation et qui corresponde à son age apparent. C'est à peu près à ce moment là qu'il se rendit compte qu'elle était pâle, et qu'autour de lui le paysage était de plus en plus morne et désolé à mesure que la nuit s'avançaient. A moins que ce ne fut eux qui s'enfonçaient dans la nuit. En chemin, elle murmurait, comme une sorte de conseil ou de sermon "La paix ne vient que par l'Oubli. Et le néant a besoin de guerrier comme toi. L'Empire t'a rejetté car tu es un Anathème à leurs yeux. Parce qu'ils ne te comprennent pas. Parce que tu leur fait peur." Il sourit, comme sous le charme "Oui" dit il simplement.
Ils arrivèrent au pied d'une pyramide fait d'un métal noir. Tout autour d'eux, des fantômes hurlaient, ou du moins, Enkil le perçut comme une plainte lancinante saccadée d'hurlements morbides. Elle continua "Ta formation est loin d'être terminée. Tu as appris des choses par toi même, mais malgré toute leur bienveillance, ceux qui t'on aidé à quitter l'Empire et à parvenir jusqu'ici ne peuvent pas t'apprendre suffisement de choses. Tu es imparfait, imcomplet, comme une chenille l'est au papillon. Tu comprends ?" Il se sentit tout à coup honteux de ne pas tout comprendre et dit "Non, je suis désolé". Elle sourit à nouveau "Viens avec moi et je terminerais ta transformation. Tu deviendras, enfin, le grand guerrier que tu as toujours rêvé d'être." il secoua la tête, un instant de lucidité lui faisant comprendre qu'elle était le mal. Que cet endroit était le mal. Comme si elle lisait dans son esprit à nouveau elle dit "Toi aussi tu es le mal. Acceptes ta condition." sur un ton tellement impératif que cela le fit sursauter. "Ne souhaite tu pas te venger de tout le mal qu'ils t'on fait ? Ne souhaite tu pas enfin connaitre la paix, comme nous tous ici ? Croit tu que ton suicide arrangerait les choses ? Ton prochain, celui qui héritera de ton Kharma souillé, ne t'en remerciera pas." dit elle, avec de la haine au coeur, comme pour le torturer psychologiquement ou le secouer en lui jettant la vérité en pleine face. Et d'un coup, elle redevint mieleuse, adorable... si séduisante pour une enfant de cet age que c'en était indécent. Ils étaient à présent dans un escalier qui s'enfonçait au coeur de la Pyramide. Il n'avait pas réussi ne serais ce qu'à voir par où ils étaient passés pour entrer.
"Me feras tu confiance ? M'obéiras tu ? Serviras tu notre cause ? Et reniera tu l'Empire et ta religion passée ?" demanda t'elle, suave. Il contempla ses yeux sans age, et réfléchit. Il se perdit dans leur éclat vert, dans le sourire de cet ange venu des abysses, dans le tourment de ses remords, de ses doutes, de son incroyable solitude et de son immense besoin d'aide. "Je serais ton guide. Je serais la voix." mais il hésitait encore. Et il restait sans voix. Devant lui s'étendait les merveilles de la pyramide du souvenir. Des serviteurs fantômatiques s'adressaient à celle qui lui servait de guide sous le nom de "la sage fille des vents de folie" il sourit en pensant qu'effectivement, il était sans doute devenu fou, car un tel lieu n'aurait su exister réellement. "Tu ne rêve pas" dit elle d'un ton à nouveau impératif. "Et puisque tu veux la mort, je te la donnes" dit elle, avant de l'assomer. Les voix qui le hantaient la nuit ne l'atteignirent pas dans ce lieu reculé au coeur des abysses. Pour la première fois, Enkil vivait une nuit en paix. Il sentit le néant l'engloutir progressivement, devinant les fantômes avides qui l'entouraient, prêt à le dévorer, tels les misérables vampires qu'on décrivait dans les Immaculés Ecrits. "Alors, préfère tu disparaitre, et hanter ces lieux ou bien te lever et marcher parmi les braves ?" dit la voix de la jeune fille. "Reconnait tu ton état d'Anathème ?" demanda t'elle "Oui" murmura t'il avec difficulté. "Reconnait tu que tu as vendu ton nom ? " il hésita "Oui, je ne suis plus Sesus Laruja." et elle ajouta "Et tu n'es plus Enkil. Tu seras la Lame des Tourments." il pleurait dans son demi-sommeil comateux, proche de la mort "Oui. Tout ce que vous voudrez. Si vous me laissez en paix."
La voix hurla, inhumaine à présent. "En paix ? Mais veut tu vraiment à ce point mourir sans avoir rien fait de ton existence ? Est tu lâches à ce point ?" il pleurait. "Non, je ne veut pas mourir, pas encore." avoua t'il, tremblant de peur, et des sanglots qui étaient les siens. Une odeur de sang lui monta aux narines. "Renie tu le Soleil derrière l'emblème duquel tu câches ta damnation ?" demanda la voix, il semblait tout à coup qu'elles étaient plusieurs, comme si une cohorte de démons innomables d'étaient joint à la voix de la fillette venue des abysses. "Oui" murmura Enkil, presque mort, des larmes de sang coulant sur ses joues et sur son front. "Qu'il en soit ainsi" dirent les voix de démons. Et la fillette d'ajouter "Nous te prenons ton nom, Enkil, car tu n'es plus. Nous te prenons ton nom Sesus Laruja, car tu n'en voulais plus. Nous te prenons ton dieu, Exalté du Soleil, car tu es à présent un fils de la nuit et des ténèbres. A notre service à jamais, Lame des Tourments tu te nomeras. La mort tu dispenseras à mon commandement. Puisque de toute façon tu es un assassin, un démon, acceptes le. Embrasse les ténèbres qui te tendent les bras et revient à la vie parmi nous pour semer la mort. Ou disparais à jamais dans le néant." Et Enkil mourut, puis hurla sa colère et son désaroi, tandis qu'il avait l'impression qu'on lui arrachait les aîles. Des ailes qu'il n'avait pas. Puis il sombra dans le sommeil à nouveau. Lorsqu'il se reveilla, il était dans un lit. Sur son front, la marque de la Nuit était brulée et purulente d'un Sang pâle et pateux, infecté. Il se leva et regarda son visage dans un miroir. Celui ci était pâle comme celui d'un cadavre et l'on voyait les veines sur ses tempes et sous ses yeux.
Il ne fallut pas longtemps à Lame des Tourments pour comprendre qu'il avait vendu son nom précédent. Il était désormais un chevalier de la mort, de la caste du jour, un assassin serviteur du néant. Ce n'était plus la chaleur du Soleil qui le consumait lorsqu'il hurlait sa colère face à ses ennemis mais un éclat de noirceur venu des profondeur des abysses elles mêmes. Et pendant les premiers jours de son existence nouvelle dans la Pyramide du souvenir, "la sage fille des vents de folie" était à ses cotés, toujours. Elle le regardait comme une petite fille aurait contemplé sa première oeuvre d'art. Et malgré tout ce qu'il pouvait penser, malgré ses doutes, ses humeurs et son éducation, il se rendit compte à son contact que c'était vrai : il était un démon, et maintenant qu'il s'acceptait comme tel, la vie était plus simple. Elle l'entraina. Et à chacun de ses progrès lui donna l'amour qu'aurait donné une mère, une soeur ou une préceptrice, tout trois mélangée, pour le meilleur de ses élèves ou de ses enfants.
Elle l’envoya au cœur des Abysses, en lui disant qu’il devrait y survivre seul pendant huit mois. Lorsqu’il revint à elle, elle le récompensa en lui offrant une armure fait d’amacier, une demeure au sein de son palais entièrement meublée et une garde robe bien remplie d’étoffes de qualité. "Pour que tu puisses me représenter dignement. " commenta t’elle simplement. Ce soir là, Petale de Lotus le rejoignit dans sa chambre. C’était une servante du Seigneur de la Mort, une de ses plus jolie dame de compagnie. "Madame m’a demandé de vous servir à partir de ce soir, et à jamais. " Il passa la nuit dans ses bras. Au petit matin il aurait pratiquement cru être tombé amoureux de cette jeune demoiselle si belle et si attachante. Le Seigneur de la Mort le convoqua. "Mes cadeaux t’ont ils plu ? " demanda t’elle avec un sourire. "Oui, maitresse. Enormément. " répondit il mais le sourire du fantôme-enfant s’effaça soudainement. "Trop je présume. " ajouta t’elle. "Tu vas me suivre dans un endroit où tu expieras tes péchés. " et elle l’emmena en un lieu secret où il subit pour la première fois les rituels permettant de se dégager de la Résonance, la malédiction de sa race. "Comprend que tu n’expie pas le pécher d’avoir couché avec elle, mais d’avoir éprouvé des sentiments pour elle. Tu es un serviteur de la Mort. Et tu ne saurais concevoir des sentiments qui conduisent à donner la vie. Me promet tu de jouer avec elle et de la considérer comme une servante, voir un objet dorénavant ? " et Lame des Tourments acquiesça.
Elle l’emmena dans de nombreux endroits secrêts de son royaume. Il fût harmonisé à de nombreuses Merveilles de l’Outremonde. "Je souhaite que tu ailles dans cette Nécropole à deux semaines d’ici et que tu retrouve et assassine celui qui se fait appeler Terreur des Abysses. C’est un némésissaire au service de nos ennemis, quelqu’un qui pactise avec des fantômes vouant des cultes interdits. " et Lame des Tourments s’exécuta. "Pour te prouver ma générosité, je te confie ces pierres. Elles feront de toi un guerrier meilleur encore. " dit la sage fille des vents de folie à son retour. "Mais elles ne te seront pas utiles tout de suite, car tu part dans Création. Tu vas trouver le moine qui se fait appeler Iesid Tepet. Et tu vas l’assassiner. "
Lame des Tourments retourna pour la première fois dans Création, avec un déguisement de moine. Il s’approcha du prêtre et pendant quelques jours, devint un de ses proches. Comme convenu, il l’assassina. Il fût pourchassé par les amis du prêtre pendant un moment, avant de parvenir à rentrer. Son Seigneur de la Mort l’attendait. "Tu as été bien long. " dit elle sur un ton peu commode. Il s’apprettait à s’excuser mais elle l’interrompit avant même que les mots se forment sur ses lèvres. "Je ne veux pas de tes excuses. La prochaine fois, tu devras être plus rapide. Et moins voyant. Pétale de Lotus recevra cent coups de fouets ce soir pour te faire comprendre à quel point tu me déçois. " et il dut assister à la scène. Il pleura cette nuit là, dans les bras de sa servante. Et le lendemain matin, des gardes spétraux étaient là pour le conduire dans la salle où il pourrait expier son amour et se débarasser de sa Résonance.
Il remplit de nombreuses missions, dans Création et dans l’Outremonde. A chaque fois, son Seigneur était plus généreux en cas de victoire, et plus implacable en cas de défaite. Il se sentait proche d'elle, mais ne la comprenait pas malgré tout. Elle haissait les Sang Dragon tout comme lui, mais pourquoi ? Il ne le savait pas. Il lui avait confié les tréfonds de son âme obscure mais lui n'avait reçu aucune confidence en retour. Il l’avait servi avec loyauté et en avait été récompensé maintes fois, mais il souffrait aussi mille et un tourments à ses cotés. Il était déjà bon épéiste, il devint excellent bretteur. Il était déjà un assassin hors de pair, il devint le meilleur que Création et les Abysses eurent jamais porté à sa connaissance. Il le fit, uniquement, pour voir cette admiration enfantine dans les yeux de celle qui commandait à présent sa destinée. Et aujourd’hui, il comprenait enfin que celle qui l’aimait parfois comme une sœur ou comme une mère n'était pas son amie, qu'elle ne faisait que le préférer parmi ses serviteurs, sans jamais en faire un frère ou un égal. Il comprenait cela car elle s’était plusieurs fois mise en colère contre lui. Réalisant cela, il se retrouvait à nouveau seul. Le préféré sans doute, mais seul tout de même.
Et un matin, elle lui demanda de tuer Pétale de Lotus. Ce jour là, sa dernière parcelle d'humanité tomba en lambeau. Il était un démon, de la pire espèce. La mort marchant parmi les vivants. Il le savait à présent, il l'acceptait. Le Seigneur de la Mort qui lui servait de patron avait enfin réussi à le convertir. Il sortit son épée, trancha la tête de son aimée en pleurant, puis regarda son Seigneur et Maître droit dans les yeux. "Je pense que je vais devoir expier mes péchés à nouveau" murmura t’il. "Mais vos désirs sont des ordres et vous voilà débarassée de cette servante devenue inutile à vos yeux. " Elle sourit, et l’envoya extraire la Résonance qui le hantait. Quand il en revint, se dirigeant vers ses appartements, elle le fit venir à lui. Elle lui confia une épée et trois nouveaux serviteurs. "Pour tes bons et loyaux services. Tu vois que je ne suis pas ingrate mon ami. "
Les trois serviteurs étaient : Chien de Jade, un des meilleurs pisteurs humain de cette partie de l’Outremonde ; Cœur de Diamant, une jeune servante prométeuse qui avait suivi le Seigneur de la Mort pendant un temps ; et Pillier de l’Ombre, un des garde humain du palais. Lame des Tourments ne commit pas l’erreur de les traiter autrement que comme des suivants, mais il les respecta et ne leur fit jamais de mal. Ce qui suffit à gagner leur loyauté au delà même de tout ce que le Seigneur de la Mort aurait pu espérer d’eux s’il les avait gardé à son service direct. Il enchaîna sur d’autres missions, toujours plus étranges et périlleuses. Et quelques mois supplémentaires passèrent, se transformant en années, déchirant ses restes d’humanité en lambeaux définitivement. Un soir, le Seigneur de la Mort lui fit remarqué "Tu manque de culture Lame des Tourments. Tu manque de discernement. Tu manque aussi de charisme. " marqua une pause et ajouta "mais tu es la plus fine lame de ta génération, et aussi silencieux qu’une ombre. " Il ne comprit pas cette réflexion avant un moment.
Un soir, alors que Lame des Tourments était en plein méditation, Cœur de Diamant vint le voir. "J’ai surpris une conversation entre Main du Néant, le Némésissaire en charge des espions et Etang de Sang, le meilleur guerrier de la garde, le frère de Pétale de Lotus. Ils vont tenter d’assassiner notre Maîtresse. " Lame des Tourments ne put réprimer un rire. Cœur de Diamant eut l’air dépitée. "Non, ne croit pas que je me moques. Merci de ces renseignements, tu es précieuse comme la pierre dont tu porte le nom. Je ne me moques pas de toi, mais de ces deux idiots qui pensent pouvoir réussir un tel exploit. Tu peux disposer. " et il se leva et sortit. Toute la nuit, il la passa dans l’ombre, caché près de sa Maîtresse. Et quand le Némésissaire et le guerrier humain apparurent, ayant fait dispersé les gardes qui leur faisaient maladroitement confiance, il sortit de l’ombre.
"Vous n’avez aucune chance. Oubliez ce projet. " dit il. Les deux autres rirent. Etang de Sang prit la parole "Toi, l’assassin de ma sœur. Son ancien amant. Tu devrais te joindre à nous. Ou partir. Car rien ne nous arrêtera. " Lame des Tourments fit tomber son épée, sa veste de kimono, révélant que contrairement à l’accoutumée, il ne portait pas sa chemise de mailles d’amacier en dessous de cette veste. "Je ne ferais pas l’affront de vous affronter avec les cadeaux de notre Maîtresse. Seules mes mains suffiront. " et il bondit hors de ses sandales, pieds et poings nus, l’aura fantômatique de ses techniques d’exaltés lui conférant une force et une agilité hors du commun. Etang de Sang et Main du Néant l’affrontèrent. Main du Néant était un fantôme puissant, mais Etang de Sang un simple humain. Ce dernier fut le premier à succomber aux attaques mortelles de l’Abyssal, sous le regard amusé de sa Maîtresse, qui bien entendu, n’était pas dupe et aurait déjoué l’attaque même s’il n’avait pas été là.
Main du Néant et Lame des Tourments se retrouvèrent face à face. "Renonce" dit une fois encore le Chevalier de la Mort. Mais le fantôme n’obéit pas. "Si ce n’est mon enveloppe corporelle, ce sera mon âme qui te dévorera de l’intérieur. " Ils bondirent et le Némésissaire parvint à blesser grièvement l’abyssal qui retomba lourdement à coté de son épée. "Je vois que tu es du genre sérieux comme adversaire et que je t’ai sous-estimé. Je vais devoir te sortir le grand jeu, je suppose. " dit il en ramassant ses deux Daiklave et en les décrochant l’un de l’autre. Main du Néant se jetta sur lui une fois encore "Tu n’as même pas de parole ! " furent ses derniers mots avant qu’une tempête d’amacier ne le déchire en lambeaux. La forme spectrale du Némésissaire se précipita vers un hôte potentiel : un des garde qui avait accouru suite au bruit du combat. Ce fût ce moment que choisit le Seigneur de la Mort pour intervenir : d’un regard, elle pétrifia le fantôme et l’Oblivion, le néant dont il portait le nom, le dévora tout entier. Elle se tourna alors vers Lame des Tourments et dit : "Soigne toi. Et reviens me voir. Je te confierais l’organisation d’espion dont tu viens d’occire le chef. " sur un ton qui n’était ni aimable, ni reconnaissant, simplement neutre.
Quelques jours plus tard, Lame des Tourments prenait en charge la centaine d’espion du Royaume. On lui annonçait également que sa Maîtresse avait pris sous son aîle de nouveaux exaltés, qu’il n’était plus "le seul". Il aurait aimé s’enquérir de savoir s’il était toujours son préféré, mais de telles questions étaient inavouables. Il ne pouvait qu’attendre. Et continuer à servir sa Maîtresse du mieux qu’il pouvait.
Qui lui revelerait un jour qu'il avait été trompé par l'Ordre Immaculé, qui lui avait fait croire qu'il était un démon alors qu'il était alors un serviteur du bien et du Soleil Inconquis ? Qui lui révelerait un jour qu'il avait été trompé par les serviteurs des Abysses, qui lui avaient fait croire que vendre son Nom aux Malféens et devenir un Abyssal faisait partie de sa transformation et qu'il en était réduit à cela ou mourrir ? Qui lui révélerait que toute sa vie n'était qu'une erreur ? En tout cas, ce jour là n'était pas encore venu. |